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L’exposition temporaire 2022 de l’écomusée, « Tous au sport, sport pour tous ! », met en lumière certaines pratiques individuelles ayant la nature comme terrain de jeu. À la belle saison, les habitants de Haute-Lande croisent de temps en temps, le long des routes ou dans les bourgs, des marcheurs qui se distinguent des « simples » randonneurs par leurs équipement et bagages indiquant qu’ils sont en chemin pour un long voyage. Celui-ci les mène à Saint-Jacques-de-Compostelle, ou tout du moins vers une étape de la voie de Tours, l’une des quatre voies traversant le département des Landes.

Toutes les enquêtes semblent indiquer que ce pélerinage est de plus en plus pratiqué. Toutefois, si 20 % des marcheurs inscrivent leur démarche dans une pratique religieuse, 20 % des « pélerins » prennent le chemin vers Saint-Jacques motivés par le défi sportif, les autres expriment une quête de sens, de ressourcement, de rupture, de rencontres et de découverte du patrimoine1.

Aux XIe et XIIe siècle cependant, alors que les pélerins sont de plus en plus nombreux, être doté d’une foi inébranlable devait être bien utile pour traverser certaines régions rurales si l’on en croit les guides alors édités par des auteurs richement pourvus d’imagination et de préjugés. Le Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle, du XIIe siècle, propose une vision peu encourageante de la traversée des landes intérieures que son auteur, probablement le clerc poitevin Aimery Picaud, décrit comme une  « épreuve angoissante, le pire des affrontements avec une nature ennemie, celle de l'enlisement dans les sables marins, au milieu d'un désert et dans l'épuisant harcèlement des nuées de taons qui vous poursuivent »2. Je passe sur les descriptions des habitants dont la présumée sauvagerie sera honteusement colportée pendant des siècles.

Alix de Saint-André3, en revanche donne une image du chemin haut-landais, expérimenté en 2007, bien plus joyeuse. Si elle alerte sur le danger de cheminer trop près des camions le long des routes départementales, elle se souvient quelques mois après son pélerinage que marcher « sur de souples chemins de sables, c’était somptueux ». Le chemin lui permet aussi d’apercevoir « sur des plages de  prairies, de charmantes maisons de poupées de bois, à peine posées sur l’herbe ». Elle conclut sa traversée de la Haute-Lande par Pissos, « les belles Landes désertes, [...]il fallait bien qu’un pèlerin y passe pour contempler le monde et en avoir le cœur ébloui ».

 Depuis l’invention du tombeau supposé de l’un des douze apôtres, Jacques, vers 813-830, ce pélerinage ayant la cathédrale de Santiago de Compostella comme point d’arrivée, bénéficie d’une très forte notoriété. En France, la voie la plus empruntée serait celle du Puy-en-Velay mais beaucoup cheminent sur les voies de Vezelay, d’Arles ou de Tours, pour les principales. Au Moyen-Âge, les pélerins se distinguent par plusieurs attributs : le bourdon (bâton), la besace, une calebasse en guise de gourde, une escarcelle (grande bourse suspendue à la ceinture), un chapeau, un manteau ou une cape souvent renforcés au niveau des épaules par un mantelet. L’écomusée conserve deux de ces attributs particulièrement rares et intéressants, exposés au sein de l’exposition permanente du Pavillon :

- un mantelet de pèlerin en cuir daté du XVIIe, exposé par le passé lors d’importantes expositions « compostellanes », orné des emblèmes typiques : les coquilles, les médailles en plomb, les médaillons de verre protégeant des images pieuses et les bourdons de pélerins miniatures en os.

- une calebasse, localement appelée cuyoun, ornée probablement également au XVIIe siècle de gravures tirées de l’iconographie chrétienne (comme le christogramme « IHS », ancienne abréviation du nom de Jésus-Christ), inspirées par des scènes historiques ou par les paysages et scènes pouvant avoir été rencontrées au fil du chemin (troupeaux, maisons...).

 

Mantelet de Pelerin

Légende mantelet : Mantelet de pèlerin, n° d’inv. 1995.26.1

  Gourde de Pelerin

Légende gourde : Gourde de pèlerin, n° d’inv. 1995.26.2

 

Alors tous à vos chaussures de randonnée et à votre credential ! Septembre serait la meilleure période pour prendre le chemin...

 

Rédaction : Florence Raguénès, conservatrice

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1 https://www.culture.gouv.fr/Actualites/Les-Chemins-de-Compostelle-entre-pelerinage-et-modernite

2 Emmanuel Filhol, « L'image de l'autre au Moyen Age. La représentation du monde rural dans le Guide du pèlerin de Saint-Jacques de Compostelle », Cahiers d'histoire [En ligne], 45-3 | 2000, mis en ligne le 13 mai 2009, consulté le 25 juillet 2022. URL : http://journals.openedition.org/ch/285 ; DOI : https://doi.org/10.4000/ch.285

3 Alix de Saint-André, En avant, route !, Gallimard, Mayenne, 2010

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